Réconfortant !
Il y a peu, répondant à une sollicitation d’un certain nombre d’organisateurs et de responsables d’associations de banlieues, je me suis rendu à la mairie de Bobigny dans le département de Seine Saint Denis. Département de la Couronne parisienne qui fait souvent parler de lui…Il s’agissait de participer à une manifestation parfaitement bien organisée, regroupant autour d’une thématique porteuse - l’insertion en entreprise- des représentants d’entreprises, grosses ou moyennes, des élus et des responsables d’administrations et de collectivités, et bien évidemment des jeunes gens qu’ils soient encore lycéens ou sortis du système scolaire voire engagés dans un cursus destiné à leur donner un emploi. Je me suis rendu à cette invitation en tant que « général des banlieues » à la demande de celles et de ceux que j’avais « accompagné » il y a plus d’un an maintenant dans cette opération « emploi, permis, citoyenneté » et avec lesquels je maintiens le contact depuis. Compte- tenu des témoignages à apporter, je m’étais entouré de quelques uns de mes fidèles compagnons de route qui avaient pris sur leur temps pour venir avec moi en ce samedi après-midi. Sortant du métro sous une pluie fine j’avais l’impression de me trouver dans un environnement totalement « décalé »: galerie marchande vieillotte et peu engageante, parkings glauques, immeubles des années soixante-dix aux façades grises, sales et tristes, Préfecture de département ressemblant à un ouvrage fortifié de la ligne Maginot ou à l’un de ceux du « Mur de l’Atlantique » édifié par l’organisation Todt , l’Hôtel de Ville, tentaculaire, sans âme et copie conforme de ce que j’ai pu voir il y a quelques années en Europe de l’Est – à croire que les architectes souhaitaient façonner un même type de bâtiment pour les municipalités, qu’elles soient à Sarajevo, Gdandsk, Pristina ou…Bobigny -, avenues sans charme et rues se ressemblant toutes. Pas facile de se retrouver dans ce dédale bétonné si ce ne sont les panneaux parfaitement visibles et sans poésie: avenue Lénine, carrefour de la Liberté, place Stalingrad…
Ce n’est certes pas la première fois que je me rends dans ces centres urbains, plus laids et inhumains les uns que les autres, situés seulement à quelques dizaines de minutes du cœur de la capitale et toujours avec le même questionnement : comment responsables politiques et architectes ont-ils pu concevoir et accepté de tels ensembles? Comment ne pas s’être rendu compte, au cours de ces années là, qu’ils posaient durablement les ferments d’incompréhension qui dégénèreraient à terme, par la force des choses, en révolte larvée? Incapacité d’anticiper les conséquences d’une telle promiscuité et plus sûrement un manque de courage quand il était encore temps de réagir…N’est-il pas déjà trop tard ?
Dans la très grande salle qui nous accueillait, un public nombreux, aux nationalités mêlées, attentif et discipliné, volontaire, avait pris place sur des sièges disposés autour d’un large écran à quatre faces qui occupait le centre du dispositif. L’équipe organisatrice avait parfaitement orchestré la tenue de ce forum qui avait commencé dés le matin. Un reportage témoignage filmé, d’une vingtaine de minutes, a permis une mise dans l’ambiance avant de « rebondir » avec les questions de la salle. Les thèmes abordés, de manière très directe auprès de ces jeunes gens vivant au quotidien dans la cité, que ce soit à Bobigny ou alentours, portaient sur le travail, la scolarité, le rapport à l’autorité, la famille ou les amis, l’avenir en tant que salarié et citoyen, bref des questions simples sur le sens que chacun souhaite donner à sa vie et les attentes comme les aménagements souhaités pour y parvenir.
Pas de grandes phrases, aucune révolte, beaucoup d’espoir et de bon sens, beaucoup d’attention à l’égard des adultes ; une recherche de repères, le besoin de sentir une plus grande équité, de comprendre, le souhait réitéré de fermeté mais indissociable de justice, acquérir une situation non exclusivement pour rechercher la fortune à tout prix mais pour fonder une famille heureuse -celle que , bien souvent , on aurait souhaité avoir et que l’on a pas eue -, en tout cas le travail représente bien la condition essentielle pour s’insérer au sein de la société.
Je ne puis que me trouver conforté dans cette démarche qui est mienne depuis des années et pour les idées que j’essaie de vous faire partager chers bloggeurs, par ces témoignages directs et d’une franchise exprimant des attentes, somme toute légitimes: être citoyen Français.
Pourtant certains, ici ou là, émettent encore quelques doutes quant à la pertinence de ce combat pour la citoyenneté que nous devons mener collectivement. A défaut ou en cas d’échec, nous risquerions de connaître des moments difficiles pour ne pas dire non maîtrisables…
Dans ces conditions l’éducation, l’école, la scolarité, les études, l’aide aux plus faibles sous forme de tutorat, l’apprentissage du Français aux parents nouvellement intégrés, savoir lire , écrire et compter en fin du primaire, éviter d’arriver en seconde avec ce handicap rédhibitoire et honteux parce que le redoublement n’a plus cours, pouvoir assister aux cours sans être distrait par les chahuts qui sont devenus la règle dans certains établissements, avoir des enseignants qui se fassent respecter et leur demander d’avoir un regard plus curieux sur le monde économique afin de pouvoir le faire partager aux autres, apprendre enfin en paix éloigné du tumulte de la rue, pouvoir suivre des cours de rattrapage en dehors des horaires règlementaires y compris pendant les vacances scolaires pour atteindre le niveau, suivre des cursus qui soient adaptés aux métiers proposés et ne plus avoir des filières fourre-tout, acquérir les règles élémentaires comportementales aussi simples que savoir se présenter, s’habiller ou connaître des bonnes manières furent, dans le désordre des témoignages, quelques un des points forts énoncés par ces jeunes en quête de savoir et de savoir être.
Réalistes, faisant preuve de bon sens, parfaitement conscients de leurs manques et soucieux de s’en sortir par le travail, constructifs et incisifs parfois : c’est plutôt réconfortant !
Acquiescement et étonnement, adhésion et soulagement ; ainsi les générations aspirent-elles, peu ou prou, à un même idéal de vie que leurs aînés, le système éducatif étant au cœur du défi à relever.
Mais qui en parle vraiment, qui évoque les ratés, les incompétences, les incuries, les manques, les erreurs comme les insuffisances d’un système qui continue à « fabriquer » sans se remettre en cause, année après année, ces dizaine de milliers d’exclus qui iront grossir les rang des chômeurs pour la vie?
Je n’ai entendu aucun candidat durant cette campagne s’exprimer vraiment sur ce sujet essentiel, si ce n’est à la marge. Pourtant c’est bien de notre avenir commun dont il s’agit et celui-ci passe par l’éducation et la formation d’une partie de notre jeunesse qui continue à être exclue du corps social faute d’avoir procédé à un véritable aggiornamento de notre système éducatif.
Dans la salle, devant les feux croisés des divers témoignages, quelques représentants de l’Education Nationale, prenant le soin de dire qu’ils s’exprimaient en leur nom, ont justifié les difficultés rencontrées par le manque de moyens, comme d’habitude…
Un peu facile, d’autant que les chiffres sont connus et suffisamment évocateurs : premier budget de l’Etat, doublement de celui-ci en moins de dix ans, effectif quasi constant du corps enseignant quoiqu’on en dise, pour des résultats qui n’évoluent guère : entre 160 000 et 180 000 jeunes d’une classe d’âge quittent chaque année depuis trente années le système scolaire sans savoir ni lire, ni écrire, ni compter…
La contradiction a été apportée, clairement et sans ambiguïté, sans passion et avec résignation, par plusieurs laissés pour compte : une goutte d’eau dans la marée de celles et de ceux qui « galèrent » pour s’en sortir…
A quand, non plus une politique appréciée sur ses moyens, mais jugée sur ses résultats ? C’est cela que le public attendait !
Ce n’est certes pas la première fois que je me rends dans ces centres urbains, plus laids et inhumains les uns que les autres, situés seulement à quelques dizaines de minutes du cœur de la capitale et toujours avec le même questionnement : comment responsables politiques et architectes ont-ils pu concevoir et accepté de tels ensembles? Comment ne pas s’être rendu compte, au cours de ces années là, qu’ils posaient durablement les ferments d’incompréhension qui dégénèreraient à terme, par la force des choses, en révolte larvée? Incapacité d’anticiper les conséquences d’une telle promiscuité et plus sûrement un manque de courage quand il était encore temps de réagir…N’est-il pas déjà trop tard ?
Dans la très grande salle qui nous accueillait, un public nombreux, aux nationalités mêlées, attentif et discipliné, volontaire, avait pris place sur des sièges disposés autour d’un large écran à quatre faces qui occupait le centre du dispositif. L’équipe organisatrice avait parfaitement orchestré la tenue de ce forum qui avait commencé dés le matin. Un reportage témoignage filmé, d’une vingtaine de minutes, a permis une mise dans l’ambiance avant de « rebondir » avec les questions de la salle. Les thèmes abordés, de manière très directe auprès de ces jeunes gens vivant au quotidien dans la cité, que ce soit à Bobigny ou alentours, portaient sur le travail, la scolarité, le rapport à l’autorité, la famille ou les amis, l’avenir en tant que salarié et citoyen, bref des questions simples sur le sens que chacun souhaite donner à sa vie et les attentes comme les aménagements souhaités pour y parvenir.
Pas de grandes phrases, aucune révolte, beaucoup d’espoir et de bon sens, beaucoup d’attention à l’égard des adultes ; une recherche de repères, le besoin de sentir une plus grande équité, de comprendre, le souhait réitéré de fermeté mais indissociable de justice, acquérir une situation non exclusivement pour rechercher la fortune à tout prix mais pour fonder une famille heureuse -celle que , bien souvent , on aurait souhaité avoir et que l’on a pas eue -, en tout cas le travail représente bien la condition essentielle pour s’insérer au sein de la société.
Je ne puis que me trouver conforté dans cette démarche qui est mienne depuis des années et pour les idées que j’essaie de vous faire partager chers bloggeurs, par ces témoignages directs et d’une franchise exprimant des attentes, somme toute légitimes: être citoyen Français.
Pourtant certains, ici ou là, émettent encore quelques doutes quant à la pertinence de ce combat pour la citoyenneté que nous devons mener collectivement. A défaut ou en cas d’échec, nous risquerions de connaître des moments difficiles pour ne pas dire non maîtrisables…
Dans ces conditions l’éducation, l’école, la scolarité, les études, l’aide aux plus faibles sous forme de tutorat, l’apprentissage du Français aux parents nouvellement intégrés, savoir lire , écrire et compter en fin du primaire, éviter d’arriver en seconde avec ce handicap rédhibitoire et honteux parce que le redoublement n’a plus cours, pouvoir assister aux cours sans être distrait par les chahuts qui sont devenus la règle dans certains établissements, avoir des enseignants qui se fassent respecter et leur demander d’avoir un regard plus curieux sur le monde économique afin de pouvoir le faire partager aux autres, apprendre enfin en paix éloigné du tumulte de la rue, pouvoir suivre des cours de rattrapage en dehors des horaires règlementaires y compris pendant les vacances scolaires pour atteindre le niveau, suivre des cursus qui soient adaptés aux métiers proposés et ne plus avoir des filières fourre-tout, acquérir les règles élémentaires comportementales aussi simples que savoir se présenter, s’habiller ou connaître des bonnes manières furent, dans le désordre des témoignages, quelques un des points forts énoncés par ces jeunes en quête de savoir et de savoir être.
Réalistes, faisant preuve de bon sens, parfaitement conscients de leurs manques et soucieux de s’en sortir par le travail, constructifs et incisifs parfois : c’est plutôt réconfortant !
Acquiescement et étonnement, adhésion et soulagement ; ainsi les générations aspirent-elles, peu ou prou, à un même idéal de vie que leurs aînés, le système éducatif étant au cœur du défi à relever.
Mais qui en parle vraiment, qui évoque les ratés, les incompétences, les incuries, les manques, les erreurs comme les insuffisances d’un système qui continue à « fabriquer » sans se remettre en cause, année après année, ces dizaine de milliers d’exclus qui iront grossir les rang des chômeurs pour la vie?
Je n’ai entendu aucun candidat durant cette campagne s’exprimer vraiment sur ce sujet essentiel, si ce n’est à la marge. Pourtant c’est bien de notre avenir commun dont il s’agit et celui-ci passe par l’éducation et la formation d’une partie de notre jeunesse qui continue à être exclue du corps social faute d’avoir procédé à un véritable aggiornamento de notre système éducatif.
Dans la salle, devant les feux croisés des divers témoignages, quelques représentants de l’Education Nationale, prenant le soin de dire qu’ils s’exprimaient en leur nom, ont justifié les difficultés rencontrées par le manque de moyens, comme d’habitude…
Un peu facile, d’autant que les chiffres sont connus et suffisamment évocateurs : premier budget de l’Etat, doublement de celui-ci en moins de dix ans, effectif quasi constant du corps enseignant quoiqu’on en dise, pour des résultats qui n’évoluent guère : entre 160 000 et 180 000 jeunes d’une classe d’âge quittent chaque année depuis trente années le système scolaire sans savoir ni lire, ni écrire, ni compter…
La contradiction a été apportée, clairement et sans ambiguïté, sans passion et avec résignation, par plusieurs laissés pour compte : une goutte d’eau dans la marée de celles et de ceux qui « galèrent » pour s’en sortir…
A quand, non plus une politique appréciée sur ses moyens, mais jugée sur ses résultats ? C’est cela que le public attendait !