Passage à la ca(i)sse?

Publié le par E.R.

En tant qu’observateur quelque peu médusé, comme une majorité de Français silencieux, je  me montre dubitatif devant un tel déferlement de violence gratuite quasi quotidienne qu’il m’est donné d’observer par petit écran interposé, à heure fixe, comme au spectacle.

L’image est parfaitement bien orchestrée
avec ses rassemblements, ses déplacements, ses habituels casseurs, ses agressions envers ceux qui souhaitent manifester dans le calme, ses slogans qui réveillent de lointains souvenirs -ceux d’une époque qui me paraît pourtant révolue- celle de la « pensée unique ». Images de nos forces de l’ordre stoïques, subissant sans broncher les assauts répétitifs et les jets de projectiles : cibles faciles ! Vision navrante de carcasses fumantes, de vitrines brisées, de commerces mis à sac, de mobiliers urbains saccagés, de débris éparpillés, sans raison. Images désastreuses et ravageuses hors de nos frontières, celles d’une France rabougrie, tournée sur son passé, pour ne pas dire hors jeu dans un monde qui se structure et qui s’est mis, depuis une dizaine d’années déjà, « en ordre de bataille » sans nous, afin de faire face, du mieux possible, aux attendus de ce siècle dans lequel l’économie sera au cœur de notre existence. Faut-il s’en réjouir ou faut-il le déplorer ? Peu importe: il convient de relever le défi. Il n’y pas d’autre issue !

La réalité me paraît plus contrastée
. C’est celle d’une jeunesse rassasiée de biens de consommation mais orpheline de grand dessein de vie, de plus en plus consciente que nombre de formations suivies au lycée comme à l’université ne sont plus adaptées au marché du travail actuel comme aux offres à venir, que la durée au travail sera nécessairement  allongée de manière drastique en raison des dettes et déficits colossaux que notre génération a accumulés et que nos enfants seront  contraints d’éponger,  et  que  la  précarité dans tous les domaines de leur quotidien devrait devenir, par la force des choses malheureusement, la règle partagée par tous. Cette jeunesse dans la rue, du moins celle qui recherche, sans heurts, une marque de considération de la part des adultes que nous sommes, doit être regardée au travers d’un double prisme. Celui  du désespoir d’une génération en quête d’absolu –sans avoir trouvé, à ce jour, les  réponses à leur questionnement- et d’une sourde révolte devant notre incapacité d’adultes – responsables du pays depuis des années- à leur avoir « montré la voie ». Ils sont non seulement nos enfants, certes, mais ils se sentent d’ores et déjà des adultes qui auront à prendre, bientôt, la responsabilité de notre destin collectif.

Publié dans Coups de gueule...

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L
tu as tout à fait raison anne , ce projet va dans le bon sens... et votre analyse general est pertinente. félicitations à ce blog très interessant
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A
Merci Emilie pour ton message... Mais quel rapport avec l'article? J'étais moi-même à la manif et je n'ai pas du tout le même sentiment... En revanche, général, je suis parfaitement d'accord avec votre analyse.On a décidément besoin de gens qui savent nous parler et nous comprendre!Bravo pour le projet que vous avez mené! Dommage que l'on n'en ait pas plus entendu parlé... Ca va dans le bon sens à mon avis!@+,Anne.
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N
Le tissu de betises et de mensonges de la reponse precedente sent bon la manipulation de l'information.<br /> Il suffit de lire" les RG sont du coté des casseurs" pour comprendre la stupidité de ce soi disant temoignage
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R
Émilie, étudiante en Anthropologie à Lyon II<br /> <br /> Je suis allée à Paris le 23 mars 2006. La manif s’est bien passée et il y avait du monde. Nous, gens de Lyon, de Grenoble, de Chambéry, avons formé un beau cortège "Lyon tient son Paris". Certains parisiens sont venus nous remercier d’être venus jusque là et nous étions fiers, même si le gros des lyonnais était à Lyon, sous les gaz des CRS.<br /> <br /> Nous étions vraiment nombreux ! Puis, peu à peu, des vagues d’une centaine de "casseurs", appelés au son de cornes de brumes, dévalaient dans la foule, puis occupaient les lignes de bus ! Certains se sont fait voler ou frapper. À la fin de la manif, ils étaient des centaines... Environ 3 000 CRS et gendarmes mobiles bloquaient la place !<br /> <br /> Les "casseurs" choisissaient une proie, fonçaient à 20, 30, 50, 100 sur lui (elle) et le (la) défonçaient et le dépouillaient ! Les forces de l’ordres s’en sont pris plein la gueule aussi mais les premiers visés étaient les manifestants. Les manifestants sortaient de la place tant bien que mal mais certains restaient à l’intérieur. Des voitures ont commencé à brûler, les vitrines à péter. Mon groupe a décidé de partir à la gare et je suis restée avec une amie car des potes à moi étaient à l’intérieur.<br /> <br /> Les flics bloquaient l’accés à la place à tout le monde. Les passants nous ont accusés d’être les fauteurs de trouble, de faire repartir le bordel des banlieues ! On a dû leur expliquer qu’on était dans la rue car on n’en peut plus de vivre avec 300 euros par mois et d’être pris pour des cons ! Trois casseurs se sont précipités dans la rue, ils ont été interpellés puis sont passés... carte de Police à la main ! Là, on a halluciné, les mecs étaient vraiment chauds ! On s’est faufilé aprés eux car je voulais absolument rejoindre ma pote ! Un flic nous a avertis que si on repassait par là, il nous arrêterait. Il n’y avait plus rien ! Les pompiers éteignaient les voitures mais les casseurs étaient tous partis. Tout était calme...<br /> <br /> J’ai rejoint les quais, il ne restait plus que des manifestants en état de choc. On a voulu sortir, mais les camions de flics nous prenaient en sandwich et nous empêchaient de sortir ! Je me suis avancée vers l’un d’entre eux pour lui expliquer qu’on n’était pas d’ici, qu’on hallucinait, qu’on voulait se barrer de cette ville de merde. Il nous a dit d’arrêter de sourire ou que ça risquait de mal tourner. Nous étions piégés ! Pourtant ils voyaient bien qu’il ne restait plus qu’une centaine de manifestants apeurés. Les flics ont commencé à nous filmer et étaient morts de rire face à notre incompréhension et à notre terreur. Ils ont commencé à charger sur ma droite et la foule s’est précipitée contre l’autre cordon de CRS. Une fille, paniquée, leur a demandé des informations, elle s’est fait gazée, puis le gendarme s’est excusé ! Mes genoux claquaient. Le cordon de flics s’est dissous, nous avons couru mais d’autres ont débarqué et ont fait barrage. En fait, ils nous déplaçaient contre le commissariat...<br /> <br /> Les cordons se resserraient contre nous, ça hurlait dans tous les sens, deux filles voilées pleuraient. J’avais peur que l’un de nous tombe , que l’on meure étouffés ou piétinés... Les médias étaient parmi nous et nous canardaient de flashs, surtout dès qu’on hurlait. Les flics nous compressaient violemment pour qu’on se révolte et que les médias puissent prendre des photos ! Morts de trouille face aux assauts des forces de l’ordre, nous avons levé nos mains au ciel... Là, ils ont paru bien emmerdés ! Les flash fusaient toujours...<br /> <br /> Un flic avec un fort accent de banlieue nous a dit de ne pas paniquer (très drôle), qu’on allait juste vérifier nos identités, que l’ordre de se disperser avait été donné plus d’une demi-heure auparavant et qu’il ne fallait pas nous étonner. Puis vint l’heure de la mise en scène médiatique ! 5 ou 6 flics rentraient en trombe parmi nous, se jetaient sur un mec, le plaquaient violemment au sol. Là, ils attendaient trente secondes, le temps des photos, puis viraient le mec. Ca a duré plus de deux heures. Je tiens à préciser que les arrestations se sont placées dans un ordre bien précis : ils ont commencé par les noirs, puis par les arabes, suivis des mecs qui avaient des dreads ou les cheveux longs, la violence était également graduée. Un gars s’est fait piétiné sous nos hurlements. C’était vraiment très violent..<br /> <br /> Nous étions toujours filmés par les flics morts de rire. Ils évitaient tout de même de nous regarder dans les yeux. Par dessus la masse de casques de flics, le drapeau français flottait ; une drôle d’impression m’a serré le bide.... Une bande de 6 "racailles" est sortie escortée de la cour du commissariat. Ils se sont retrouvés avec nous, on a traité les flics de racistes, les gars scandaient artificiellement qu’ils n’étaient pas dans la manif. Ils se sont glissés dans un coin, 5 CRS les ont fait sortir discrètement (nous sommes 3 ou 4 a avoir vu la scène), une fille s’est accrochée à eux pour sortir, les flics sont allés la chercher et l’ont remise dans le cercle, les gars sont partis sous l’oeil complice des flics. Je hurlais sur un photographe, le traitait de collabo, de traitre. Il m’expliqua qu’il prenait juste des photos, qu’il n’écrivait pas les textes dessous, que parfois c’était utile, comme pour le syndicaliste dans la coma par exemple. Je me calmais, je voulais qu’il m’explique. Il m’a confirmé qu’il leur fallait des photos, que Sarkozy sait ce qu’il fait quand il ordonne de ne s’en prendre qu’au manifestants, que tout le monde sait que les RG sont avec les casseurs, sont dans toutes les manifs, dans toutes les AG. Je lui répondais que non, que moi, je ne savais pas, en tout cas pas à ce point !<br /> <br /> Nous commencions à comprendre tous ce business, certains flics sont des "casseurs", des RG infiltrés pour embraser la foule, certains "casseurs" doivent avoir des arrangement avec eux pour nous taper sur la gueule dans les manifs (ça passe toujours mieux au JT plutôt que ce soit les CRS ou GM qui nous fracassent) et puis il y a les moutons, ceux qui suivent juste pour se divertir... Ils ont fini par me prendre par le bras pour m’interpeller, enfin ! Le flic était surpris que je vienne de Bron, je gardais le silence face à sa voix toute douce, il m’a souhaité un « passez une bonne soirée mademoiselle », sourire charmeur à l’appui, comme si tout cela était tout à fait normal, comme s’il avait l’habitude ! Il était 20 heures, l’heure des infos. Mes deux amies sont sorties juste après moi, mais nos deux potes, eux, n’étaient pas dans la rue...<br /> <br /> On les a appelés, ils étaient dans un fourgon et allait être dispatchés dans des commissariats, ils ne savaient ni quand ni pourquoi, mais on les laissait répondre au téléphone. On a donc loupé notre train qui partait à 20h, on les a attendus jusquà 22h puis on a pris le dernier TGV pour Lyon. Un des deux a été relâché vers minuit, aprés avoir été transporté dans plein de cellules ; on lui a demandé s’il reconnaissait avoir perturbé l’ordre public puis on l’a relâché. Il n’avait toujours pas de nouvelles du dernier. Ils étaient de retour aujourd’hui.<br /> <br /> http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=24857
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C
Vous avez dépeint la réalité mon Général.  Il manque à ces jeunes ce que nous avons connu nous. Nous avions  beaucoup moins et nous apprenions à vivre avec les autres, de tous les milieux sociaux. Le service militaire était l'occasion de se "frotter"(dans le sens noble du mot) les uns aux autres. Je ne suis pas ancien légionnaire, mais un lieutenant honoraire de circulation routière , qui a séjourné avec son peloton de la CCR 223, un certain temps, au PC LANGUEDOC en1960, et escorté votre Ancien, le Général LENNUYEUX, Inspecteur de la Légion à l'époque, dans le Nord Constantinois.<br /> Pardonnez moi l'expression, mais j'espère que votre "audace" sera payée de retour !
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